– les photos vont être rajoutées à l’article sous peu –

HA 1 Hawaï Alaska Jour 1

On a hissé haut les voiles et la pioche hors de l’eau de la baie de Hanalei à 15.45 lundi 5 juin 2023.

En même temps que nos potes Réjane et Charly qui naviguent sur Longtemps sur l’Ô sur leur Océanis 411 tout beau tout bleu.

On a longuement longé la Na Pali Coast qui ne pâlit pas au soleil couchant, au contraire ; ses déchirures et successions de pics ravinés par les pluies et les vents se mettent en valeur, dentelles d’ombres et de lumières conjuguées par le soleil qui poursuit sa course au-delà de nous ; les falaises s’élancent hors de l’eau et grimpent très vite, jusqu’au plateau où sont postés quelques observatoires. Roche brune, roche rouge, rare végétation qui souligne les reliefs, eau bleu canard, et ciel bleu au-dessus des falaises, parsemé de moutons blancs et gris pour mettre un peu de contraste dans ce paysage qui n’en manque pas …

Quand je pose la question aux gars de savoir comment ils décrivent la côte Na Pali :
Dixit Nathan « ses pointes étroites qui s’élancent vers le ciel me rappellent les épines du Christ. Violente dans la géologie unique qu’elle prétend avoir »
Dixit Hervé « irréel – c’est déjà pas mal, non ? Bon, Nathan, on met le leurre rose ou le poulpe ? »
Dixit Mélanie « on dirait presque des bricelets ces pans de roche, c’est si finement ciselé … »

Un magnifique tableau pour quitter cet archipel Hawaïen que nous avons peu visité, faute aux ours et aux saumons qui nous attendent, avec un Hugo à l’horizon !

Lundi à 18h, on a bordé les voiles et mis le cap au 330, NNW, sous un bon 20 noeuds.
18 heures notre heure devient donc le moment de la journée où on compte les miles parcourus pendant les dernières 24H.

L’île de Kauai nous a offert ses beaux souffles de fin de journée, puis le vent a gentiment molli jusqu’en fin de nuit. Une vraie navigation de demoiselles, estivale et presque lacustre tellement le plan d’eau est doux avec nous. Quel confort et quel bonheur d’entamer une traversée de manière si sereine, pas de nausées ni de difficultés particulières pour aucun des trois, c’est trop cool !

On a pris nos quarts chacun son tour, Le Cap de 21h à 23h, Nathan de 23h à 01h, ma pomme de 1 à 3, et re-Le Cap de 3 à 5, puis Nathan puis moi … sacrément cool, on dort bien !! Pour l’instant … ça sera certainement différent un peu plus haut …

Mardi 13h. Pas besoin de regarder les instruments, Hervé ne cesse de commenter le vent et tous les autres bruits du bateau … On l’entend sans cesse “oh lala, le vent est à 5.2 noeuds” et puis “oh pfffff, on a à peine 3 noeuds, c’est le grain qui arrive qui nous change le vent” … et encore “à cette heure-là, on devrait pas avoir si peu, ça va être dur” … mais bon, c’est comme ça.

Et puis en fait il y a peu d’air, mais on avance quasi à la même vitesse que le vent souffle, alors hein, c’est pas mal !!! Merci la belle bulle rouge en l’air.

On sait que les premiers jours sont annoncés avec très très peu d’air, on traverse une espèce de pot-au-noir au-delà duquel on se frottera de plus près aux dépressions du nord Pacifique.
Nathan à l’instant “b’en on n’est pas prêt d’arriver à cette vitesse là… !!” Il faut dire que même l’hélice de l’hydrogénérateur ne tourne plus tellement on n’avance pas …

Sylvie & Laurent sur SALAVIDA (un Garcia Exploration 45) et Véronique & Benoit sur RISORIUS (un Garcia 45 aussi, ancienne génération et passablement modifié), partis 3 jours avant nous, sont à 335 miles nautiques de Myriades. Ils filent une route plus à l’Est, naviguent de conserve et restent en visu, à 5 miles l’un de l’autre.

Nous on a perdu LONGTEMPS SUR L’Ô au petit matin, pourtant on imaginait qu’avec ce petit temps ils nous côtoieraient bien plus longtemps Longtemps … Ils sont à 24 miles à notre sud.

Mardi 15h. L’océan est aussi lisse qu’une goutte de mercure, l’onde de la faible houle est très longue, le vent absent. On passe à la risée Volvo pour aller chercher les airs un peu plus loin, peut-être après le grain qui se dessine à notre tribord.

15h30. Le vent est repassé plein Est, à 12-13 noeuds, on avaaaannnce !!! Yeeepyeah, 7 noeuds !!

18h : le vent est redescendu en dégringolade … 136 miles nautiques en 24h … pfffff … bon, à ce rythme on serait déjà arrivés à Calvi depuis Bormes, mais là c’est l’Alaska qui est au bout de la route, faudrait qu’on avale un peu plus de miles chaque jour … mais bon, on a la foi !!

18h c’est aussi un bon moment : celui de la pesée ! En fait ça fait une heure que Nathan s’occupe de sa daurade coryphène … 6 kg au bout de la première ligne, on a relâché la seconde, le frigo et le congelo sont pleins ! Et miam, on a 1 kg 900 de filets levés tout beaux !!! Et comme l’a dit Nathan 6 fois pendant qu’il préparait son poisson : chouette ! On va bien manger !!

Voilà pour quelques nouvelles, l’aire de jeu est installée dans le carré (on a baissé la table, sorti tous les coussins, et on va vivre là, couchés vautrés allongés, c’est l’endroit le plus agréable à l’intérieur du bateau pour des longues distances), les bouteilles et les conserves bien calées, les pulls prêts à être enfilés mais encore rangés, la température est super agréable (27 à l’ombre sans vent) pendant la journée, et la nuit dehors on varie les tenues … Nathan en débardeur et moi en polaire, haha.

Allez, voilà pour une première journée, il faut qu’on en garde un peu sous le coude pour les jours à venir …

 

HA 2 – mercredi 7 juin Mmmmh, daurade au bbq!

Bon, beaucoup moins de choses à raconter aujourd’hui …

. L’impression que ça fait des jours qu’on est partis,
. Les matchs entre la patience et l’impatience,
. Mon premier Banana Bread, merci Charly, et on a tous validé la recette !! C’est con, c’étaient nos trois dernières bananes, et on quitte la zone où ces jolis sourires jaunes poussent allègrement dans la nature, à portée de main … si on avait su que c’était si bon, on aurait pris des régimes entiers de bananes !!
. Les échanges par iridium avec les bateaux copains en navigation, autour de nous, aux Marquises et au Canada,
. Le froid devant, chaud derrière, ou l’inverse d’ailleurs selon d’où vient le vent, puisque cet énergumène nous souffle dessus depuis tous les points cardinaux en les conjuguant (NE, NW, SE, SW) au fil de la nuit, de la journée, des nuages qui passent,
. Le moment où l’on guette le speedomètre et la seconde où on se dit : là ça va, on a suffisamment  patienté, on va demander à Volvo de nous aider sur quelques miles pour aller à la rencontre de la prochaine bulle d’air … On l’a appelé à la rescousse une première fois vers 2h du mat, puis quelques autres petites heures par ci par là, parce que une vitesse bateau à 1.9 avec un vent de 3-4 noeuds qui arrive par le 120, c’est rude …
Et ça permet de faire cuire du pain !!! Un mal pour un bien.

La matinée a été galère, grains, pluie, pas de vent, manœuvres régulières pour envoyer les voiles avant, rentrer les voiles, … la météo est compliquée !
Trouver la route à suivre pour le lendemain et les jours à venir est un vrai casse-tête, les prévisions sont extrêmement versatiles, les modèles européens et américains n’annoncent pas les mêmes vents, et puis surtout, la réalité du terrain est rarement celle qui est prévue, d’où la difficulté du navigateur et l’impression de tirer des plans sur la comète …

Cet après-midi le vent est un peu plus soutenu et surtout bien orienté, le régime météo plus stable ! On navigue depuis midi à nouveau à une vitesse proche de 5 noeuds, vent apparent entre 7 et 9 noeuds au 40, le bateau avance et ça fait du bien !!! Malgré un courant contraire …

On a eu un peu de pluie, espèce de crachin breton, pas de gros grain. On a eu toutes sortes de grains : avec pluie et sans vent, avec vent et sans pluie, avec pluie et vent, ça varie. Et ils sont légers, passagers célestes fugaces.

Hier soir on avait tellement peu d’air qu’on a pu croquer dans les filets de daurade snackés au barbecue !! Premier BBQ en mer !!
Ce soir on la dégustera à la Tahitienne certainement, avec un bol de riz. On mange plutôt bien pour l’instant, on a encore de la salade verte fraîche, des légumes, et la mer ne nous a pas encore rabattus sur les conserves préparées avant notre départ.

Je demandais tout à l’heure à Nathan si ce n’est pas trop dur d’être contraint à ne rien faire … il m’a regardée avec un grand (immense !) sourire en me disant “non non, c’est bien !”. Sa journée a été occupée par la musique et les dessins animés.
Herve lui est entre bateau et séries, et moi entre fourneaux et fin de mon premier livre.

Le soleil se couche chaque jour un peu plus tard, on a déjà gagné 15 minutes de lumière depuis notre départ, ce soir ce sera à 19h34 et la température est toujours à 27 degrés … La lune elle se lève de plus en plus tard, à 23h40. Quelle flemmarde celle-là !

Oups, j’ai oublié : 107 miles en 24h, piètre performance … proche du 8 km/h …

 

HA 3  – jeudi 8 juin Et encore 6 fois ça ?

SALAVIDA et RISORIUS sont à notre NE à 360 miles de nous, Salavida mange du thon et Risorius du thazard, il y a encore un peu de poisson dans cet océan …
LONGTEMPS est à notre SSE à 75 miles et mange une délicieuse pizza faite maison, pendant que nous terminons gentiment la daurade.

Je cite Hervé “c’est vraiment dommage qu’on ne puisse pas pêcher du cochon … “

On est au jour 3, celui où on se dit “quoi ? encore 5 ou 6 fois ce qu’on vient de faire ?!?!?!” … bon, en termes de conditions “vie à bord”, c’est ok, c’est tout à fait confortable. Mais c’est quand-même long tout ce temps à rien faire … ok ok, on assume nos choix et on ne se plaint pas, c’est juste un constat. Un peu mal au postérieur, haha !

On est au jour où le près (allure du bateau vent de face, donc le nez s’enfonce dans la vague et en ressort inlassablement) s’annonce pour quelques jours, alors on vide la cabine arrière bâbord dans la cabine avant (qui, vous le devinez, devient impraticable à cause du mouvement du bateau) et hop, on a un nouveau lit à l’arrière ; l’aire de jeux est vivable à plusieurs pendant la journée, mais la nuit c’est une autre histoire.

Le ciel nous en envoie de toutes les couleurs aujourd’hui, du bleu au blanc tout en passant par les 50 nuances de gris, on met un pull au vent et on enlève le t-shirt sous le vent.

Matinée “je largue je borde je largue je borde je …” et l’après-midi est plus établi, on frôle les 14 noeuds (de vent !) mais on est plutôt entre 9 et 12 … pas oufff mais ça fait une partie du job.

Ça fait du bruit aussi autour de nous, c’est bon signe, ça veut dire qu’on avance ! Enfin … ! Stop, chut, ne pas vendre la peau de l’ours avant de …

C’est chouette de naviguer à trois, ça change la dynamique de bord. On dort mieux la nuit, plus longtemps, donc on dort moins la journée, et on a du coup un peu plus de temps à soi, c’est sympa. Pour observer les trains de grains, pour bouquiner les guides sur l’Alaska, pour rêver les yeux dans le bleu, pour écouter quelques podcasts bien sympas, pour prendre une douche à l’arrière du bateau quand le soleil nous réchauffe, et … pour ne rien faire.

C’est rare “rien faire”.
On ne sait plus “rien faire”.
On n’a pas souvent le temps de laisser la place à “rien faire”.
On cherche souvent à remplir, à produire, à rentabiliser, à valoriser, à s’activer, à communiquer, et on en oublie de savoir “rien faire” bien …
Pourtant ne dit-on pas aux enfants qui s’ennuient “quelle chance ! Quelle merveilleuse chose de s’ennuyer ! prends le temps de t’ennuyer, c’est là que tu découvriras plein de trésors … en toi”

Allez, on va refaire un tour en enfance !

Au compteur : 112 miles. Pfffff …

 

HA 4  – vendredi 9 – Balade lacustre ou transPac?

Bonjour la Terre,
Comment allez-vous dans vos chez-vous ?

Ici on flotte toujours et on avance tranquillement, un mile après l’autre, une heure après l’autre, un jour après l’autre, une nuit après l’autre. Les pieds eux ne passent pas trop l’un devant l’autre …

Nathan a pêché sa troisième daurade cet aprèm, et on l’a relâchée parce que ça fait 3 jours qu’on mange que du poisson, on a envie de varier un peu les menus … Nouveauté ce soir : daurade en croûte de coco snackée, c’était ach’ment bon !

On a fait deux heures de moteur en fin de nuit, envoyé le spi ce matin, on a enlevé le spi au coucher du soleil, le courant est avec nous, le vent se balade entre 5 et 11 noeuds, nous entre 3 et 5 noeuds, il ne s’est pas passé grand-chose sur le pont … hormis que le soleil est passé de notre tribord à notre bâbord.

La mer est calme, c’est super agréable.
C’est comme une balade estivale sur le Léman, petite brise légère, chaleur parfaite, vent rafraîchissant et peu soutenu, peu de vagues, onde de houle très longue, c’est délicieux. Il ne faut juste pas réfléchir et se dire qu’il reste 1800 miles (au minimum) à courir, parce qu’on a laissé 118 petits miles derrière nous depuis le dernier relevé …

Les grosses dépressions qui s’annoncent à 7 jours semblent vouloir rester à l’ouest, ça nous va bien … bon, on a le temps de voir, mais déjà, ça facilite un peu le casse-tête de routage. On n’a toujours pas décidé si on maintient notre arrivée à Dutch Harbor à tout prix, on si on relâche sur Kodiak …

 

HA 5  – samedi 10 juin – Un jour comme un autre

Pas d’exceptionnel aujourd’hui, que du normal, une journée comme une autre, hormis qu’on a remonté notre moyenne H24 à 132 miles parcourus !! Youhouhou, ça veut bien dire que le vent est de retour !!

Entre 12 et 15 depuis ce matin, sauf qu’il s’est essoufflé le sudiste, et la soirée est un poil trop calme … 8-9 noeuds par vent arrière, ça fait mal au mât et aux voiles, et au Cap qui fait bien sûr corps avec son bateau.

On s’est réveillés en Bretagne, ciel gris et crachin, puis la journée a été pleine de soleil ; Nathan en a profité pour fouler son linge du pied entre deux films. B’en oui, lessive à la main. Enfin, au pied.

Pas de fils de traîne au cul du bateau, mais on relancera les lignes demain.

De nuit la nav est assez sympa, le plancton lumineux file dans notre sillage, c’est tout pétillant. La lune se lève tard, du coup on a une magnifique voûte céleste hyper lumineuse, quand les nuages ne sont pas trop nombreux, c’est magique.

Pas d’oiseaux, peu de poissons volants, pas de baleines ni de requins ni de dauphins, des bouées en plastique, des bouteilles en PET qui jouent les attrape-coquillages, des bouées de pêcheurs, on voit malheureusement plus de déchets humains que de vie marine.

Il y a quelques jours l’eau était hyper chargée en plancton et en pollen, et depuis hier elle est à nouveau magnifiquement bleu profond et lumineuse.

La météo semble nous permettre d’envisager l’hypothèse de passer entre les gouttes et les vents des grosses dépressions, et de pouvoir tirer nos bords en direction de Dutch Harbor … les routages qu’on fait à bord laissent imaginer une arrivée d’ici 10 jours … on ne sait pas si on ose y croire ou si c’est totalement irréaliste, … comme par exemple aujourd’hui 15-20 noeuds étaient annoncés et la réalité terrain ça a été 8-14 … donc … donc on est pas rendus mon Brave !

Allez, des bisous, portez-vous bien !!!

Et puis bien sûr des milliards de pensées colorées et pleines d’amour à ma famille qui célèbre aujourd’hui le mariage d’un de mes cousins !!! Longue vie à Steph et Kat, magnifiques amoureux !!! C’est dur d’être loin de vous.

 

HA 6  – dimanche 11 juin Mais où sont les airs?

Dimanche 11 juin,
Dimanche qui roule sans fin,
De bâbord à tribord,
Puis de tribord à bâbord,
Et encore et encore.

Dimanche 11 juin,
Dimanche qui touche à sa fin,
De nouveauté il n’y en a point,
Le vent on l’appelle en vain,
On tente d’aller le chercher au loin.

Dimanche 11 juin,
Dimanche pour manger à notre faim,
Les lignes à l’eau ont filé,
Deux daurades sont à nouveau remontées,
La plus grosse au frigo s’est planquée,
Et l’autre à l’eau est retournée.

Vous l’aurez compris, on est un peu tanqués dans une bulle quasi sans vent, les airs faiblards viennent du sud, donc dans nos fesses, donc on n’avance pas.
À l’absence de vent, vous rajoutez une houle qui nous malmène et qui fait mal au bateau, et vous avez un topo pas jojo …

131 miles au compteur, et là, on vient de relancer le moteur.
À ce jour, depuis notre départ il a tourné seulement 12 heures. C’est respectable et ça vous montre à quel point on fait preuve de patience …

Bon, dodo les amis, il est l’heure de mon quart repos, Hervé est de veille de 21 à 23, Nathan prend la suite jusqu’à 01.30, puis à mon tour jusqu’à 4h du mat, comme ça le Cap dort bien et il reprend au tout petit matin.

 

HA 7  – lundi 12 Le vent s’annonce

Aloha les Myriadiens,
Ici le vaisseau flottant qui commence à voguer correctement …

On est enfin dans un flux du SSE qui nous permet de filer droit vers le nord à une vitesse tout à fait respectable et agréable. 160 miles parcourus, on recommence à taper dans les tableaux qu’on aime quand on a une longue route.

Quand on va vite les journées pompent de l’énergie parce que le bateau bouge tout le temps et tout est compliqué, mais quand on va lentement dans une mer agitée sans vent, c’est tout pareil. Alors autant aller vite, les jours en mer sont moins nombreux.

Ces jours, je cuisine comme si j’étais debout sur une balançoire, c’est un peu casse-gueule. C’est bon pour travailler la proprioception, haha, et l’équilibre en général. On oublie les plats décorés et bien présentés, on va a l’essentiel : nourrissant, bon, chaud et qui nécessite le moins de vaisselle possible. Et on mange souvent à une main, l’autre retient l’assiette sur la table.

On ne mange plus dehors à trois depuis hier, car on a installé notre dog-house, complément de protection à la capote, ce qui nous permet d’avoir 2 places assises à l’extérieur entièrement à l’abri du vent et de la pluie. Le troisième larron mange debout dans les escaliers. Chacun ton tour. Pour l’instant. Parce que la table intérieure est transformée en grand canapé où Nathan visionne ses films et fait passer le temps.

Et puis le dog-house nous permet -en climat froid- d’avoir une vraie “pièce à vivre” en plus, qui est chauffée par l’intérieur du bateau. Comme aujourd’hui j’ai fait du pain et un bread-pudding, il fait chaud “en haut”, Nathan peut rester en débardeur encore quelques jours ! Quoi qu’en fait, on commence à avoir froid aux pieds. L’air fraîchit.

On a pu observer comme une étoile filante une belle daurade bleue en train de chasser les poissons volants ; c’était magnifique de voir cet éclair turquoise bondir hors de l’eau à la poursuite de ces drôles de poissons qui se croient hors de danger quand ils se mettent à planer … en général, il y a des oiseaux qui se joignent à la partie, double prédation pour ces “pitits passons”.

Et puis comme je vous le disais, le vent est un peu plus présent, et grimpera ces prochains jours, alors pour assurer des quarts tranquilles pendant la nuit et ne pas stresser les équipiers, on vient de prendre un ris dans la GV. Et le génois, qui vole en papillon, peut facilement être diminué si besoin.

D’ici 3 jours il va falloir qu’on fasse un choix … Kodiak ou Dutch Harbor ? C’est la météo qui le dira. Pour l’instant, Dutch Harbor (le plus à l’ouest) est à 1100 miles nautiques, et Kodiak à 1350. En ligne droite bien sûr.

Le soleil se couchera à 19.56, on en devine les rayons, le ciel est encore couvert mais le bleu se dévoile par moment, le crachin et le brouillard nocturnes ne devraient pas être présent ce soir.

Voilà pour l’épisode 7 de la Hawai-Alaska TransPacifique, vous êtes bien sur Radio Ponton, restez à l’écoute et bon vent à vous !

 

HA 8  – Mardi 13 – Un bon score!

166 miles au compteur, les miles s’égrènent à une vitesse qui nous convient mieux !!

Dehors c’est tout gris, il pleut, on sort des longueurs de manches et des longueurs de jambes, sauf Nathan qui résiste par le bas : toujours en bermuda, mais avec polaire, chaussettes et Croc’s. Eh oui, la Croc’s, idéale en mer par toutes les conditions, dedans dehors dessus dessous, elle tient chaud quand il faut et surtout nous protège les orteils … Certaines personnes disent aussi que c’est un accessoire utile quand on tombe à l’eau, il augmente notre flottabilité. Pour autant qu’on laisse les pieds en-dessous de soi …

Le thermomètre extérieur est resté accroché au climat Marquisien : il fait 25 nuit et jour. La réalité est d’un autre genre … 21 petits degrés dans le bateau, 17.8 à l’extérieur. Herve a mis les pieds dans l’eau, elle est proche de la température de l’air … fraîche l’eau, bientôt à température idéale pour le pastis !

Sinon dans les mauvaises nouvelles, la liste s’allonge aujourd’hui …
. Certaines de nos conserves ont “lâché” et donc voilà 3-4 repas qui partent à l’eau, on ne va pas prendre de risque d’intoxication alimentaire dans nos conditions … On se rabattra sur des pâtes au beurre. Ou la future pêche des gars, mais là on avance trop vite pour pêcher, et surtout c’est moyen moyen de dépiauter le poisson sur la plage arrière dans ces conditions (froid, pluie, grosse mer, vent bien soutenu).
. La prise de l’aspirateur nous a lâché, pas critique mais ça rentre dans la loi des séries.
. L’ordi du Cap ne veut plus le laisser s’ouvrir.
. Mais le plus important, c’est que le radar a rendu l’âme !! Plus moyen de détecter les grains en identifiant les rideaux de pluie, plus possible de voir un bateau qui échapperait à notre œil aguerri ou naviguerait de nuit sans feu, et surtout, plus moyen de naviguer dans le brouillard … et en Alaska, le brouillard est monnaie très très courante … mais … mais pourquoi va-t-on en Alaska si on ne voit rien, la faute au brouillard, et qu’il fait un temps froid et humide pour ne pas dire mouillé ???

Donc un gros M aujourd’hui, vive la technologie … !! c’est dit avec énervement et gratitude … ça fait ch… que les choses tombent en panne les unes après les autres, et en même temps, grâce à notre téléphone satellite, Hervé a déjà pu communiquer avec les bateaux copains et avec notre super technicien en France pour identifier la panne (il a surtout confirmé la mort de notre radar). Donc la situation merdique est déjà en cours de résolution, on va vraisemblablement pouvoir se faire livrer un nouveau radar à Kodiak.

Est-ce qu’on vise quand-même Dutch Harbor ? La décision n’est toujours pas prise, mais l’élément “radar” aura un poids dans le choix. À suivre …

Sinon, et puis surtout, surtout, aujourd’hui 14 juin c’est l’anniversaire de notre Hugo Cadeau de la Vie ! Joyeux Anniversaire mon Grand, et mille bisous d’amour de nous trois !!!

 

HA 9  – jeudi 15 – RAS

Bonjour la Terre,
Comment allez-vous ?

Ici tout va bien, rien de neuf rien à signaler, l’équipage et son bateau avancent honorablement, 161 miles nautiques derrière nous au compteur des 24 heures.

On se lève le matin dans un climat gris et froid, enfin, pas si froid que ça, mais on n’est pas encore habitués à ces températures (16 dehors, 17 dedans). Donc je disais, on se lève pour s’étendre assez rapidement, position de loin la plus confortable à bord.

D’ailleurs, on peut réviser la célèbre phrase qui dit “pour vivre heureux, vivons cachés” … chez nous c’est “pour vivre heureux, vivons couchés” …

Nathan était mort de rire l’autre jour quand son smartphone (son intelliphone …) lui a signifié son rapport d’activités journalières : 3 pas, 2.7 mètres parcourus, 0.3 étages montés … haha !
Par contre son rapport de films visionnés s’allonge de jour en jour : 36 films et dessins animés vus depuis qu’il est arrivé à Honolulu … pas mal pour un seul homme ! Bon, Hervé n’est pas loin en nombre d’épisodes de séries, ils se laissent volontiers happer par ce joli moyen d’évasion.

En termes de climat, c’est gris nuit et jour, gris beaucoup plus foncé la nuit d’ailleurs, et on a eu pas mal de bancs de brouillard. Quand il se lève, on redécouvre la dimension de l’horizon, qui lui aussi conjugue le gris à tous les tons.

On n’a effectivement plus de radar ce qui est problématique quand on navigue par visibilité faible (voire nulle) mais rassurez-vous, on a toujours le moyen de détecter et identifier les navires autour de nous, équipés d’un émetteur AIS, lequel nous renseigne précisément sur les caractéristiques desdits bateaux (nom, pavillon, dimensions, route suivie, vitesse, destination, distance au plus près de nous, etc…). Et à ce jour, sur notre zone : aucun AIS en vue sur nos écrans. Donc la probabilité d’incident (collision ou autre) est quasi inexistante. Et puis on a toujours la VHF allumée, et nos feux de navigation pendant la nuit. Donc aucun souci.

Ça pourrait être plus compliqué dans les eaux chaudes du Pacifique, où il est relativement fréquent que les bateaux abritent de nuit des navigateurs profondément endormis, confiants, se fiant uniquement à leurs instruments (et alarmes) pour les réveiller, mais on sait bien qu’il nous arrive à tous de ne pas entendre le réveil … Mais sous nos latitudes, il y a moins de monde.

Allez, je vais m’extraire de mon banc où je suis calée dans plein de coussins, sortir de sous ma petite couverture pour aller réveiller le Cap, c’est à lui de prendre le prochain quart, et je vais aller m’allonger sous une couverture un peu plus chaude pour finir ma nuit.

Ah ! une info qui nous réjouit : on a enfin parcouru plus de la moitié de notre trajet, et on est passé sous la barre des 1’000 miles restants !!! Espérons juste que la seconde moitié soit plus courte (en temps) que la première … !

 

HA 10 – Jeudi 15 juin – Ah b’en dis mon Tuyau …

Ah b’en dis mon Tuyau, tu t’emmerdes pas … !!?!?!? (plein de gros mots dans ce post … !)

7h du mat j’ai des frissons,
Je claque des dents et je monte le son,
Seule sur le lit dans mes draps bleus froissés … Seule dans mon grand lit glacé, c’est parce que Hervé est encore de quart (qu’il a entamé à 4h) et que Nathan est dans son lit à lui …
C’est là qu’Hervé m’appelle et me réveille : “Mel ! Mel ! J’ai besoin de toi !!!”

J’émerge péniblement, je m’attends à devoir monter sur le pont pour une manœuvre, et là, me regardant me frotter les yeux et tenter de me reconnecter à mon neurone actif, il me balance “les chiottes sont bouchés, j’ai besoin de toi pour les déboucher” … silence … mmmmhhh, délicieux comme réveil, prometteur ce nouveau jour, ça donne envie de sortir des draps glacés ….

Je tente d’esquiver, de le laisser se démerder, mais le remord me gagne rapidement, c’est pas cool de le laisser les deux mains dans la merde même si ça me fait chier d’y plonger aussi … Sans café sans thé sans p’tit dèj …
Allez, à la mine, au charbon comme tout le monde !!

La grooooosse emmerde dans les chiottes de bateau, c’est que par définition, la tuyauterie est inaccessible. Les gars du chantier prennent mille précautions pour que leurs installations ne bougent pas, du coup il y a des colliers auto-serreurs à peu près partout … et quand tu dois retirer un tuyau de là-bas derrière sans rien voir et tout deviner du bout des doigts, c’est pas génial. En plus mon chéri a des mains gigantesques donc elles ne passent pas partout … Heureusement je peux être un peu utile avec mes doigts de fée …

Je parle du tuyau, parce que pendant que je mettais péniblement un pied hors du lit, le Cap avait déjà identifié que la pompe fonctionnait toujours, et que le bouchon était situé après le broyeur des toilettes … la merde, quoi !

Au final, on a réussi à démonter le tuyau qui va de la cuve à la vanne bi-directionnelle (tournez à gauche : cuve à eaux noires ; tournez à droite : la mer). À boucher de manière étanche le tuyau bouché et incriminé, et le sortir de son logement, étroit le logement !
Pour tenter de le vider dans la mer …

Ledit tuyau, diamètre 5cm, a eu la généreuse idée de conserver et accumuler depuis 7 ans une quantité impressionnante de tartre, réduisant son diamètre intérieur d’espace circulant à 1 petit tooout petit centimètre. Son cholestérol à lui … Donc en fait, nos chiottes ont fait un accident vasculaire majeur.

En équipe médicale avisée, nous avons réussi à dégager toutes les plaques de cholest… pardon… de tartre à coup de marteau, de pliage au genou, de lance-incendie (tuyau de jardin), pour finalement retrouver un tuyau tout souple tout propre.
Qu’il a fallu remonter, puis reposer tous les serre-tuyaux, revisser les portes et les boiseries, etc etc etc, pour finir par nettoyer la salle de bain à l’alcool de la tête aux pieds.

Fin de l’histoire, 13h30, il est temps de changer de fumet et de se régaler d’un bon mahi-mahi au curry.

Et puis cet après-midi (très court après cette longue matinée) c’était au tour du tangon de nous faire chier à son tour … la patte qui tient le hâle-bas de spi menace de se rompre, il faut donc là aussi intervenir rapidement.

Heureusement dans nos emmerdes du jour, on a eu une immense chance : peu de vent, une mer calme, un ciel presque dégagé, en tout cas sans pluie, ce qui nous a permis de faire tous les travaux dans des conditions quasi idéales …. Merci la Vie

Et puis quand-même les chiffres du jour :
Température extérieure : 11 degrés, glaglagla
Température intérieure : 22 degrés, merci l’aérotherme branché sur le moteur,
Et pour finir : 141 miles nautiques au compteur.

Allez, bonne nuit ! Enfin … bonne journée à vous, et des bisous!!!

 

HA 11 – vendredi 16 – Et l’Alaska, ça ressemble à quoi?

Aujourd’hui je vous livre un extrait de nos guides, qui vous présentera un peu cette “Last Frontier” ce drôle de territoire vers lequel nous nous dirigeons.

Alyeska, la « grande terre » en langue inuit, est une appellation presque modeste, tant tout est démesuré sur cette immensité proche du Pôle Nord.

1´530´700 km2, soit trois fois la France. C’est le plus grand État des Etats-Unis.

Les côtes constituées de chapelets de milliers d’îles se déroulent sur 3 700 km d’est en ouest et 2 200 km du nord au sud.

Cet état dénombre :
1´800 îles, dont la plus grande est Kodiak,
39 chaînes de montagnes, dont 3 principales regroupent 17 de ses plus hauts sommets nord-américains.
100´000 glaciers -dont la moitié couvre 75 000 km2- représentent 5 % du territoire, 80 volcans dont la moitié sont encore en activité, 3 millions de lacs, 12 grands fleuves, 48 millions d’hectares de forêts

L’Alaska est une sorte de presqu’île à l’ouest du Canada, avec qui elle partage une frontière sur près de 2 500 km. Le reste des frontières est formé par des côtes très découpées. Elles sont baignées par la mer de Béring, celle de Chukchi et les océans Arctique et Pacifique, offrant des paysages contrastés.

La quasi-totalité de l’État (hormis les dernières îles Aléoutiennes et l’extrême sud de la «queue-de-poêle», «panhandle» en anglais) se situe au-delà du 56° Nord. Un quart du territoire se trouve au-delà du cercle polaire.

Sous ces latitudes aux contrées hostiles, la densité de population est infime : cet État américain compte 739 795 habitants, dont 401 499 dans la seule ville d’Anchorage. Densité : 0.49 habitant par km2 …

Pour vivre en Alaska, il ne faut redouter ni la nature, ni la solitude, ni les températures polaires.

La capitale administrative depuis 1905 est Juneau, avec seulement 32 700 habitants, même si Anchorage s’est imposée comme la capitale économique.

FAUNE ET FLORE

Au rythme des saisons, l’Alaska offre un spectacle naturel exceptionnel, un paradis de faune et de flore.
Trois espèces d’ours – blanc, grizzli et noir – et le fameux ours Kodiak (jusqu’à 3m50 sur ses pattes arrière). Le loup, fait aussi partie des grands prédateurs de la région. D’autres plus discrets, comme le lynx, le glouton, le renard ou le coyote.
Plusieurs herbivores dont le plus célèbre est l’élan (pas loin de 700 kg et très “chargeur”, chèvres, mouflons, caribous, bœufs musqués…
Au niveau marin, orques, phoques (barbu, rubané, marbré, largué), baleines, morses, loutres, veaux marins, otaries à fourrure, lions de mer, la faune y est paraît-il spectaculaire.
Il y a les oiseaux, dont l’emblème américain, le pygargue à tête blanche, dont 80 % de la population vit en Alaska.

Et puis la flore en Alaska est riche et variée (près de 1 500 espèces de plantes incluant arbres, arbustes, fleurs et fougères), depuis les plaines arctiques du North Slope à la forêt humide du sud-est.

LES OURS

Les ours sont de grands carnassiers. Ceux qui l’ont rencontré à l’improviste ont connu la peur de leur vie. Les accidents sont rares. Sur les 20 dernières années, 56 personnes ont été tuées par un ours (86 % par un ours brun). C’est peu au regard du nombre de rencontres annuelles entre humains et ours. Le seigneur de l’Alaska n’aime pas être surpris, il réagit alors en attaquant. Pour éviter tout problème, il suffit de faire du bruit, chanter, siffler, utiliser une clochette pour manifester votre présence.

Les recommandations à leur sujet nous font rire parfois, je vous les partage :

En cas de rencontre : Rebroussez chemin discrètement s’il ne vous a pas vu. S’il a conscience de votre présence, restez calme, ne faites pas de mouvements brusques.
Parlez-lui calmement, d’un ton rassurant. S’il se dresse sur ses pattes arrière et agite le museau, reculez lentement mais surtout NE COUREZ PAS.
Grossissez-vous, levez les bras, prenez ce que vous avez avec vous (sac à dos, bâton de marche, habits…) pour paraître plus imposant.

En cas d’approche : Continuez à lui parler, calmement mais fermement. S’il a une attitude défensive, ne paraissez pas menaçant.
S’il arrive à votre niveau, utilisez votre spray à ours ou si vous n’en n’avez pas allongez- vous et faites le mort.
S’il est agressif, criez et agissez de manière agressive.
Efforcez-vous de l’intimider.

En cas d’attaque : si l’ours vous attaque de façon défensive (l’attaque la plus courante), si vous n’avez pas de spray au poivre, faites le mort : couché ventre à terre et jambes écartées. Si l’ours vous attaque sans raison et spontanément (ce qui est très rare), ne faites pas le mort et essayez de vous défendre. Mort de rire !!!

CLIMAT

Dans l’imaginaire collectif, l’Alaska se résume au froid et aux igloos. Ce n’est pas totalement faux. Les Alaskiens ont coutume de dire que, comme partout ailleurs, il existe quatre saisons en Alaska : juin, juillet, août, et l’hiver !

De la péninsule des îles Aléoutiennes à la côte sud-est, c’est à dire tout le golfe d’Alaska d’Anchorage à Ketchikan, il règne un climat océanique frais. La région connaît donc une faible amplitude thermique annuelle et des précipitations abondantes réparties tout au long de l’année, mais avec des pics importants lors des chutes de neige hivernales. L’été est souvent brumeux avec des changements de temps très fréquents et rapides. Il règne en moyenne une température de 15°C à Anchorage en juillet.

Les îles Aléoutiennes sont froides et venteuses. On se demande bien pourquoi c’est là qu’on va …
Elles délimitent le golfe d’Alaska d’un côté, dans l’océan Pacifique, et le détroit de Bering de l’autre, face à la Russie sibérienne.

Ici l’altitude moyenne est relativement basse. En revanche, la brume est quasi permanente et l’on ne compte que 36 journées de soleil en moyenne par an. Ainsi avec des températures relativement clémentes et une humidité importante, la végétation est très dense. C’est le royaume de la forêt, avec de grands arbres et surtout les épicéas. Les sous-bois sont un tapis de mousse et de fougères luxuriantes. Seuls les endroits trop venteux présentent une végétation relativement réduite.

Quant au reste de la côte, et notamment ce qui concerne le Prince William Sound et l’Inside Passage, je vous les raconterai plus tard.

Pour terminer un mini résumé HISTORIQUE.

L’histoire de l’Alaska est mystérieuse avant la colonisation, et tourmentée après.
Peu d’information existe sur les peuplements Inuit précoloniaux si ce n’est les coutumes ancestrales de ces peuples qui n’ont pas été éradiqués ou étouffés au fil des siècles.
L’histoire blanche commence, elle, par le peuplement russe des chasseurs de fourrures à travers le détroit de Béring, avant la vente de l’Alaska aux États-Unis en 1867.
Quelques décennies plus tard, le temps de la ruée vers l’or, spécialement dans le Klondike à cheval sur l’Alaska et le Yukon canadien.
La Seconde Guerre Mondiale y laisse beaucoup de traces puisque l’armée y avait établi des bases importantes.
Ce n’est qu’en 1959 que l’Alaska devient le 49e État des USA.
Quelques années plus tard est découvert le pétrole à Prudhoe Bay, dont l’acheminement par bateau par Exxon Mobil a provoqué la marée noire du siècle en 1989.
Aujourd’hui le tourisme se développe, mais l’Alaska reste dans une dualité entre protection de ses terres et exploitations de ses ressources.

Et puis concernant MYRIADES et sa route : 143 miles nautiques derriere nous, vent doux, code D en l’air toute la journée, le génois part le remplacer à l’instant, journée pluvieuse et froide, on a réchauffé l’atmosphère en mangeant des crêpes à midi, et on s’est sérieusement enfumé le bateau !!! C’est bien quand tu évites d’ouvrir les fenêtres puisque ça caille …

 

HA 12  – dimanche 18 juin – Ça chauffe, ça chauffe!

Douzième jour en mer terminé, et derrière lui 170 miles nautiques en moins au compteur.

On avance sous GV full et trinquette une bonne partie de la journée, puis on prend un premier ris, qu’on décide de garder pour la nuit sans lui présenter son second ; ça sera vraisemblablement pour demain.

Les dépressions défilent les unes après les autres et pour l’instant on a réussi à toutes les laisser passer sans soucis particulier.

La mer est plutôt douce avec nous, mais chchchut, ne pas le dire avant d’avoir vu l’ours (prévu à Kodiak). La dépression qui nous ventile nous aide à nous hisser à un bon rythme vers le nord, tout le jeu consiste à rester suffisamment sur son bord Est pour ne pas nous retrouver dans des vents et une mer trop importants. Pour l’instant on a un bon gros 20-22 noeuds, plus ou moins au 120 donc dans le côté tribord arrière du bateau, ce qui fait qu’on avance avec les vagues ; donc mouvements plutôt doux, sauf quand une plus grosse passe par là et nous fait rouler fort. Vive les bonhommes Culbuto ! Ceux qui pour l’instant n’ont pas trop trop mal au dos.
Donc on prend garde à cette dépression, ne pas trop s’en approcher pour que ça ne chauffe pas trop, … et à la voir évoluer sur nos écrans, on se dit qu’elle pourrait même s’essouffler plus vite et plus au nord-ouest que prévu …

Sinon pour vous faire frissonner, quelques indications :
Nathan, chaussettes, jogging, t-shirt, polaire à manches parfois fermée – Hervé, chaussettes, pantalon de voile, pull technique long et polaire manches longues, fermée avec parfois le capuchon sur la tête – Ma pomme, chaussettes mérinos , collant mérinos, jogging, 2 pulls long mérinos, doudoune sans manches avec capuchon, polaire fine, et gants de nuit quand je ne fais rien.
Tout ça à l’intérieur du bateau bien sûr.

À l’extérieur on n’y va pas, on regarde à peine par la fenêtre, on vit dans notre cocon, relativement immobiles.

Dehors c’est gris, parfois on voit l’horizon (gris) parfois on est dans le brouillard, noir et gris très foncé pendant la nuit, et puis dès 03h15 la tonalité du gris commence à changer et s’éclaircir. À 04h quand Hervé vient prendre son quart, il fait quasi jour, le soleil se lève à 04h20.
Et donc à l’intérieur, à cette heure-ci, il fait 14 degrés … !!! 9 à l’extérieur …
Donc on aimerait que ça chauffe !

Quand on marche au moteur, on en récupère la chaleur et ça fait du bien à tout le monde, mais quand on est sous voile (depuis un bon moment !!!) il n’y a pas de chauffage …
Mode d’emploi du thermostat : cuire une tarte aux poires, en faisant bien préchauffer le four (qui n’est pas très étanche) ; puis faire du pain, bien sûr cuit au four, et préchauffer longtemps le four pour qu’il ait une croûte bien craquante … superbement réussi aujourd’hui ! ; manger des soupes chaudes (beurk, elles n’étaient pas bonnes) ; s’habiller (voir descriptions ci-dessus) ; se vautrer sous les couvertures ; mettre une bouillotte dans son lit (à défaut de son capitaine, puisqu’on fait nos quarts l’un après l’autre) ; et puis quand-même, au petit-matin et en fin de journée, faire tourner le webasto pour qu’il nous souffle un peu d’air chaud dans tout le bateau) Et là, miracle, on peut enlever un pull, relâcher l’élastique tendu bien fort entre nos deux omoplates, décrisper la mâchoire et savourer quelques 20 degrés.

Sinon, là où ça se réchauffe un peu, c’est au niveau de la route, on est passés sous la barre des 400 miles restants !!! Faites chauffer les … les quoi déjà ? Qu’est ce qu’on fait chauffer quand on se réjouit de quelque chose à venir ? Mmmhhh …?? J’ai un blanc . … …

Destination visée, en raison d’une absence de radar : King Cove. Entre Dutch-Harbour et Kodiak. Comme ça on aura quand-même les temps de découvrir ces fameuses Aléoutiennes en souhaitant que le brouillard ne soit pas trop présent.
Si on montait directement à Kodiak, vu les vents, ça serait compliqué de redescendre au sud-ouest.

Et Kodiak on va y passer du temps, on doit réapprendre à courir pour éviter les ours, découvrir plein de rivières pour aller taquiner le saumon, étudier où poser les casiers pour pêcher les crevettes, installer notre nouveau radar (qui arrive mercredi !!! Merci la solidarité entre voileux, c’est précieux !!! et c’est là certainement que Hugo nous rejoindra. Oh on a hâte de le voir débarquer celui-là !!!

 

HA 13  – lundi 19 – Mais qu’est-ce?

Je vous avais promis les dauphins, les voici.

C’était je crois la seule journée un peu dégagée de la semaine, et entre deux trois allers-retours sur le pont, on a vu un dauphin arriver par le côté arrière, nous rattrapant à toute vitesse, suivi par tout un tas de ses copains bondissants.
Des petits obus gris foncé, ventre blanc et ligne blanche sur le côté, plutôt courts et trapus, qui jaillissaient de toutes parts.

C’est toujours magique de les voir débarquer, venir nous flairer, dire bonjour et nous accompagner un moment, jouer à la proue du bateau, virevoltant dans les flots.

Ils étaient … pfff, dur à dire, mais une bonne cinquantaine peut-être.

Et puis on a vu arriver un autre banc de ce qu’on pensait être des dauphins encore, mais non, à bien les regarder, ils n’évoluaient pas du tout de la même manière hors de l’eau, n’avaient pas la même manière de sortir et replonger, ni la même courbure dorsale ; ils n’avaient pas non plus de nageoires dorsales d’ailleurs, une nageoire caudale qui ressemblait furieusement à une paire de pattes … c’étaient des phoques. Fuselés, élancés, bombant tour à tout hors de l’eau. Ils ne sont pas venus se mêler aux dauphins et ne se sont pas rapprochés de nous.

Et là, en cherchant à comprendre ce qu’on voyait, sont apparus d’autres énergumènes encore : ça ressemblait furieusement à des dauphins, dans la forme l’allure la nage le comportement la silhouette, sauf que ceux-ci étaient quasi noirs et surtout n’avaient pas de nageoire dorsale ! De longs corps fuselés et luisants, puissants, fins, mêmes bobines que celle des dauphins … qu’était-ce ? Mystère, nous chercherons quand nous serons à terre. On a trouvé, depuis : ce sont des lissodelphis borealis.

Globalement, on a vu très peu d’animaux dans ce Pacifique nord … qu’ils soient en l’air ou dans l’eau.

Quelques puffins bruns, larges, lourds, puissants volant en zigzaguant au-dessus des vagues. Parfois des oiseaux de la taille d’une sterne, au plumage plutôt foncé, véloce et acrobate dans les airs à quelques centimètres de l’eau remuante. Deux trois gros grands goélands, corps gris ailes blanches soulignées de noir.

De poissons ou mammifères marins, point hormis nos belles daurades éclatantes de jaune et de turquoise. Merci mesdames (aucun mec à la tête bien carrée ne s’est pointé !) d’avoir eu la délicatesse de croquer à notre hameçon …

Un peu de plancton luminescent en début de traversée, puis plus de petites étoiles filantes dans notre sillage.

Mais, mais, mais je dois rajouter que vu la météo, déclinant à l’envi tous les tons de gris, tous les degrés de pluviométrie et de densité brouillardeuse variables, nous avons peu guetté le dauphin, le poisson volant ou la baleine …

Retour à aujourd’hui, treizième jour (et autant de nuits) sur le grand bleu, à vivre au rythme du vent et des vagues, de nos estomacs et de Morphée. En gros. Pas de projets fous pendant cette traversée, pas d’objectifs ambitieux, juste vivre tout ça au mieux, avec plaisir et douceur.
De temps en temps les vagues nous malmènent, mais pour une fois, l’océan est plutôt bien rangé, pas de mer croisée ni déchaînée.

On a réussi à profiter un max de la dépression sans grosses conditions, on a parcouru à nouveau 171 miles et il nous en reste à l’instant (3h15 du matin lundi 19 juin chez nous) 225 à courir avant de pouvoir relâcher à King Cove.

On espère avoir encore assez d’airs pour arriver mardi avant la nuit, et puis sinon on fera des ronds dans l’eau avant d’approcher la côte de plus près mercredi …

Et dans les enquiquinements de la vie à bord, le chauffage fait des siennes … il hoquète, s’arrête, puis repart sans que le HCS (Hervé Couteau Suisse) ne trouve de cause à cette panne …
Alors pour contrecarrer ce mauvais sort, on fait chauffer le four à chaque repas. Demain j’essaierai de faire des petits pains à beurgueur (je sais, ça ne s’écrit pas comme ça … bienvenue aux USA)

Allez, des bisous des câlinous de nous à vous, et à tout vite

 

HA 14 … Mardi 20 juin – Le bout?

Bonjour Amis Terriens,
Comment allez-vous ce matin ?
Ici ça sent un peu la fin,
Plus tôt ça fleurait bon le pain.

Le four fonctionne chaque jour, pièce centrale de notre chauffage d’appoint. Le webasto (chauffage officiel du bateau) nous a fait l’immense plaisir de repartir correctement ce matin, nous apportant un énorme Ouffff de soulagement !

Je prends mon quart (1h30 du mat) pour la première fois depuis qu’il fait froid dans un bateau chaud (j’ai quand-même mes 2 pulls et toutltoutime), quel bonheur !!! Oui, le moteur tourne … donc on récupère sa chaleur pour tempérer notre cocon et surtout le déshumidifier.
Comme les airs nous ont un peu lâchés en fin de journée (10 noeuds pile dans les fesses, avec une houle bien existante, la GV souffrait beaucoup trop pour qu’on la laisse se faire battre à cette allure), et puisque nous devrions être capables d’avaler ces derniers miles encore aujourd’hui mardi pour arriver à King Cove, on a double motivation pour se laisser bercer (et pousser) par la risée Volvo.

Alors on espère que la veille du jour le plus long de l’année on n’arrivera pas de nuit, ça serait trop con … Aujourd’hui le soleil se lève à 4h10 et se couchera à 21h17.

Donc ça ressemble bien au bout …
Le bout de cette traversée Nord Pacifique
Le bout des légumes frais (il nous reste 5 carottes et 3 petits choux rouges, et des patates et des oignons et une papaye)
Le bout de ce collier sur lequel on a enfilé des perles d’heures les unes après les autres
Le bout du monde tout à l’ouest des USA
Le bout des nuits entrecoupées
Le bout de la vie quotidienne à une main
Le bout de l’horizontalité inclinée à 20 degrés (oh ! tu ne serais pas de Marseille toi ??!)
Le bout du roulis
Le bout de ce temps particulier qu’est le tempo d’une traversée
Le bout du bruit constant
Le bout du l’aire de jeux dans le carré (dommage, c’est super confortable !)
Le bout des nuits sans mon chéri
Le bout des films et séries qui occupent les journées (belles moyennes masculines)
Le bout de ces 2’000 miles nautiques prévus à parcourir (on vous dira précisément combien en arrivant)
Le bout de ces interrogations constantes sur l’évolution de la météo
Le bout de ces échanges quotidiens avec les bateaux copains qui eux aussi arrivent à terre (SALAVIDA devrait arriver après le dèj, RISORIUS ce soir. ORPAO et LONGTEMPS sont attendus en fin de semaine. Tous à Kodiak). Moi j’aimais bien ces petits messages qui volaient des uns aux autres, merci les amis !
Le bout des ennuis techniques ? On croise les doigts !!!

On va savourer cette dernière (?!) journée sur l’eau même si le moteur nous chante dans les oreilles, avec un bateau plat et chaud, un peu de calme malgré tout, et on espère surtout arriver sans brouillard, pour avoir la chance de d’apercevoir et découvrir le relief de ces terres éloignées de tout, appréhender leurs dimensions, leur agencement, leurs couleurs, on a hâte !!

 

HA 15 … 15 jours tout pile! – Mercredi 21 juin

Ça y est, on y est !

15 jours tout pile après notre départ de Hawaï, à la minute près !! Et on a fini à la voile, contrairement à ce que je disais hier.

2165 miles nautiques, soit une vitesse moyenne de 6.015 noeuds, incluant 45 heures de moteur.

Pour les terriens : 4000 kilomètres, soit une vitesse moyenne de 11.13 km/h … aussi rapide qu’une tortue, non ?
Bahh, finalement l’important c’est d’arriver, entiers.

On a atterri le même jour que SALAVIDA qui est parti 3 jours avant nous. Ils sont arrivés sur l’île de Kodiak, soit une route plus longue de 200 miles que la nôtre. Mais quand-même … pas loin … haha. Myriades et Salavida ont la même coque.

On a eu l’immense bonheur de voir le brouillard se lever lorsque on a commencé à se faufiler entre les îles et les ilets, d’être accueillis par des baleines et des macareux, et de voir des nuages bleus flotter dans le ciel.

Quelle joie de retrouver ce climat, cette fraîcheur, cette clarté d’air, ça vibre ! L’énergie marine est belle, forte, vive. Ça résonne fort la Patagonie !!

Le sentiment de retrouver un territoire connu, où on se sent tout de suite bien dans cette nature fantastique, rude, sauvage.

Les pans de montagnes tombent doucement dans l’eau plate, les reliefs volcaniques sont tout veloutés, des tons tout doux, bruns, verts, dorés. Plus loin, les pentes enneigées jouent avec d’autres courbes, tout est harmonie.

Les nuages vont et viennent, et pour nous faire plaisir libèrent complètement la baie de King Cove où on peut manœuvrer sans se faire mouiller, pour une fois ! On a même du soleil, le vrai, le chaud, qui se pose sur nous quelques minutes !!!

Je sens qu’on va se régaler, je sens qu’on va l’aimer cet Alaska !!

On vous embrasse et on file se coucher. À plat. Sans bruit. Sans quart. Sans veille. Avec mon chéri.
Bisous doux.

Ps : pas de réseau internet par ici. Nature brute.

 

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